# Freak # Chapitre 2

« Un lycanthrope, plus connu en français sous le nom de loup-garou, serait ,dans les mythologies, les légendes et les folklores, un humain ayant la capacité de se transformer, partiellement ou complètement, en loup ou en créature anthropomorphe proche du loup.
Cette transformation peut être due à plusieurs causes comme une malédiction ou un rituel volontaire, et plus récemment la morsure d’un loup ou d’un autre lycanthrope. Elle se déclenche généralement durant la nuit et à chaque pleine lune, condamnant le lycanthrope à errer sous forme de loup jusqu’au matin. Les histoires de lycanthropes sont mentionnées depuis la mythologie grecque, elles sont étendues à de nombreux pays européens, et plus récemment au monde entier. Les lycanthropes sont majoritairement décrits comme des êtres maléfiques possédant les capacités du loup et de l’homme à la fois, une force colossale, et d'une grande férocité puisqu’ils sont capables de tuer de nombreuses personnes en une nuit. Ils se rappellent rarement leurs méfaits nocturnes après avoir repris forme humaine. »

L
e tintement d’un cloche sonne l’entracte. Certains spectateurs sont amusés, croyants à une supercherie, tandis que d’autres prennent leurs jambes à leur cou. Pour ma part, j’sais pas quoi en penser. Après ce que j’ai vécu la nuit dernière, je dois dire que ma vision du monde a quelque peu changée mais au point de croire aux loups-garous, aux vampires et aux légendes comme celles-là, j’sais pas. J’suis encore sous le choc, mais il me faut des explications. Ils m’ont ramené ici, mais pour une fois que j’me sens en sécurité, j’veux pas avoir de mauvaises blagues.
D’un bond, je me lève. Le sol semble se dérober sous mes pieds tellement mes jambes sont engourdies. Combien de temps a duré cette première partie ? J’sais pas, plus que nécessaire à mon goût.

J’me dirige vers les loges. Une fois arrivé à l'entrée par laquelle Agrippa m'a conduit ici, on me bloque le passage. Un homme au regard dur et à la barbe noire. Il porte une chemise sombre et un pantalon dans les mêmes tons. C’est la première fois que je vois une personne fringuée sobrement depuis mon arrivée, même si ça lui donne un air maussade.

-C’est réservé aux artistes ici, mon petit gars. Vas donc fouiner ailleurs.

J’insiste mais il me repousse sans efforts de son seul bras gauche. Par la force, j’ai aucune chance de rentrer. J’me met à chercher un autre passage quand j’entend une voix m’interpeller.

-Hé, Watson !

C’est Gib, l’un des acrobates de tout à l’heure et l’un des hommes qui m’a ramené ici avec Agrippa. D’ailleurs j’ai encore jamais aperçu le troisième. Il faudra que je le demande.
Gib se tourne vers l’homme en noir. De toute évidence, il refuse catégoriquement mon entrée au seins de leur petite communauté. Dommage pour lui, j’suis borné et j’ai quand même besoin de mes affaires.

-Dégages Marius. C’est le père qui le demande. T’irais pas contre ses intentions, n’est-ce pas ?

Le gars en noir, Marius, émet un grognement non dissimulé avant de me laisser passer sans omettre ce regard noir typique dans ces situations. Ils réagissent tous de la même manière. Voilà qui me fait bien rire, tiens !

Je continue mon chemin avec Gib. On passe entre les différents tonnelles et le ciel étoilé donne à cet instant une tournure étonnamment solennelle. Y’a juste un truc qui me trotte dans la tête depuis qu’on chemine :

-Dis Gib, t’as dis que c’était le « père » qui me demandais. C’est qui ce type ?
-Ah, c’est vrai, j’oublie qu’on vient à peine de te ramener ici. Le père, ou « Papa » pour certains, c’est celui qui dirige notre troupe. Un gars au sourire perpétuel, à la bonne humeur et assez tape à l’œil. Tu as surement du le remarquer, c’est lui qui a présenté le spectacle ce soir. Enfin, la première partie pour le moment.

J’me rappelle de ce gars au costume violet à paillettes. J’l’ai seulement vu de loin, mais son caractère se remarque au premier coup d’œil.
J’ai pas le temps de repenser aux événements plus en profondeur qu’on arrive déjà aux portes d’une loge plus imposante que les autres. On aurait dit une petite maisonnette tractée par un chariot de luxe. De quoi être époustouflé par le savoir faire de certains, mais je suis pas la pour m’émerveiller de l’infrastructure. Gib me presse le pas et je rentre à l’intérieur de la petite maisonnette tractée.

La première chose que vous remarquez en entrant chez le père, c’est l’odeur. Il y flotte un parfum d’encens tellement vaste qu’on dirait qu’il les fume. En vérité, il est juste attiré par leurs odeurs et en met plusieurs à brûler en même temps. Ensuite, vous remarquez les murs. Ils sont tous de couleur différentes et c’est comme si on avait jeté des sceaux de peintures à tout-vas. Puis vient le mobilier. Chaque meuble est si bien sculpté qu’on aurait dit qu’ils étaient vivants.
Pour faire court, cette pièce était très, mais alors très extravagante.
Il y a un bureau au fond de la pièce. Celui qu’ils appellent le « père » y est assis et me regarde avec son grand sourire, dévoilant une dentitions parfaite. Son costume violet à paillettes toujours sur ses épaules, je remarque qu'il a de toute évidence déboutonné légèrement sa chemise blanche. Ses yeux bleus me regardent avec malice, comme vous aurait regardé un môme préparant un mauvais coup. Il a bien coiffé ses cheveux blonds vers l'arrière, comme lors de sa prestation. Agrippa est à ses cotés et me fais signe de les rejoindre. Evidemment, il avait bien pris soin de se retransformer et de se rhabiller. Sans perdre un instant, j’prends un siège et j’me pose. C’est du velours, ils gagnent bien leur vie ces types en fait.
J’regarde le père. Lui aussi me fixe. D’un regard joueur, presque moqueur, sans perdre l’éclat de son sourire. C’est quelqu’un de difficile à cerner, ça c’est sur.
D’un coup, il prend la parole. Il me surprend tellement que je sursaute :

-Tu dois être Watson ? qu’il dit d’une voix mielleuse en me tendant la main. Moi c’est Lucian, « Papa » pour les intimes.
-Pourquoi vous m’avez appelé ?
-Du calme, mon garçon, du calme ! Tu es de nature pressée, j’en ai l’impression. Pour le moment, faisons connaissance. Pour le reste, tu le sauras bientôt. Je m’étonne d’ailleurs que tu n’aie pas d’autre questions à poser. Avais-tu déjà vu un Lycan auparavant, peut-être.

Il me désigne Aggripa.

-Non, jamais.
-Et ça ne te surprends pas ?
-Bien sûr que si.
-Allons fiston ! Ne fais pas la moue, je vais finir par être triste.

Il fais mine de s’essuyer les larmes de ses poings avant de se lever d’un bond. Encore une fois, sa bonne humeur et son caractère joyeux me surprennent.
Lucian monte sur le bureau à la manière d’un conquérant, faisant mine de faire face au vent. Il a vraiment l’air con avec son costard et ses pieds nus. D’un vaste geste de la main, il désigne ce qui semble être l’horizon avant de déclarer :

-Ici fiston, les lycans ne seront pas la seule source de tes surprises ! Tu verras bien d’autres créatures que tu n’aurais pu imaginer par le passé ! Des « monstres ». Tu pourrais les appeler comme tels. Pour ma part, ils sont ma famille ! Des zoomorphes, des cracheurs de feu, des hommes invisibles, des leprechauns ! Tu n’en croira pas tes yeux, et pourtant ils existent ! Alors Watson, oui ! Oui, tu saura tout. Mais avant, laisse moi te souhaiter la bienvenue au cirque du freak de New Dell !

Le cirque du freak de New Dell ?! Putain, j’le connais ce nom !

-Vous pouvez répéter ?!

Je prononce ces mots avec tant de détermination que je saute presque sur place, mes fesses à quelques centimètres de mon siège. Brisé dans son élans et visiblement déçu, Lucian s’assied en tailleur en plein milieu du bureau sur lequel il faisait la pose une poignée de seconde plus tôt. Intrigué, il m'adresse d’un œil interrogateur :

-Je te demande pardon ?
-Vous avez dis que vous représentiez le cirque du freak de New Dell, c’est bien ça ?
-C’est exact, c’est bien ce que je viens de dire. Mais je ne vois pas en quoi cela te perturbe d’autant plus que des loups-garous.

Ne voyant pas d’autre moyen pour lui faire comprendre mon angoisse, je lui raconte en détail ma rencontre avec ce satané vieillard encapuchonné. Au fur et à mesure que j’avance dans mon récit, je remarque que Lucian me regarde avec attention et intérêt. Il a perdu son sourire machinal et semble sérieux pour une fois. Je dois avouer que ça m’inquiète un peu, vu sa bonne humeur habituelle. Quand j’en viens au passage où je tombe dans les pommes, un léger sourire en coin apparaît brièvement sur le visage de monsieur joie de vivre, faisant sursauter sa fine moustache dorée. Son regard change de ton, comme si il venait de se persuader de quelque chose qu’il soupçonnait déjà.

-Vous trouvez ça amusant, peut-être ?

A ces mots, il redevient sérieux et dénué de toute expression.

-Pas le moins du monde, déclare-t-il le torse bombé et la main sur le cœur, je n’oserais point me délecter de vos mésaventures monseigneur. Toutefois, je dois avouer que ton histoire est pour le moins… étrange.
-Vous savez quelque chose à propos de lui, pas vrai ?

A défaut d’obtenir une réponse, sa main chipotant à son bouc et son regard brillant de milles feux vers l’horizon parlent d’eux-même. Il le connait.
Avant que je puisse insister, Lucian déclare qu’il doit filer pour la deuxième partie de ce spectacle « extraordinaire ». Une excuse ? Peut-être bien. Sûrement, même. Mais je vais pas commencer à m’attirer des ennuis en harcelant le patriarche de la petite communauté dans laquelle je suis tombé. La seule chose qu’il me reste à faire, c’est attendre.

Dehors, l’air est frais. Prendre une bonne bouffée d’oxygène me détend et réussit à me faire décompresser de tout les évènements endurés jusqu’à présent. Le paysage est magnifique. On est posé, Agrippa et moi, un peu à l’écart des tonnelles, dans une clairière. Au loin, on entends les rires et les cris des spectateurs confrontés aux innombrables créatures que Lucian leurs réserve. J’aimerais y être, moi aussi, mais je suis vraiment fatigué. Décompresser des évènements ne veut pas dire non plus les oublier. Au contraire, tout me perturbe encore et j’ai toujours du mal à accepter cette réalité, mais ça ne me choque plus vraiment. Je suis comme un étranger dans un nouveau pays, je suis incapable de savoir quoi faire. Je perds mon caractère agressif.

-C’est magnifique, hein ?

Agrippa est allongé dans l’herbe à mes cotés. Sa présence est réconfortante et pourtant je le connais à peine. Et puis, c’est un lycan. Je devrais être effrayé et pourtant je suis plutôt rassuré de l’avoir à proximité.

-Tu sais, je pars de temps en temps à l’écart du campement pour admirer cette vue. Les lumières, les rires, tout ça. Pour moi, ça compte beaucoup.

Un silence se fait entre nous durant lequel on écoute la musique sortant du chapiteau. Quelques secondes plus tard, des cris retentissent à l’unisson et Agrippa et moi éclatons de rire.
Le silence revient et nous permet de revenir à nous, de garder cette discussion sérieuse.

-As-tu une famille quelque part ?

Monsieur muscles me prend au dépourvu, je dois dire. Une famille ? Pff. Tout ce à quoi ça sert, c’est à me faire repenser à ce que j’ai fait. Au meurtre de cet homme. C’était lui ou moi. Je pensais avoir gagné, mais au final j’ai tout perdu. Ma maison, mes parents, ma petite sœur. J’y ai tout laissé en échange de quelques instants de plus à vivre. Je me demande si ça en valait le coup.
A mon silence, Agrippa semble comprendre que c’est un point à éviter. Aussi change-t-il aussitôt de sujet.

-Tu as déjà voyagé ? Moi jamais, je viens d’une petite ville à l’Ouest. J’aimerais bien visit…
-Qui êtes-vous ?
Cette question me trotte tellement dans la têtes en ce moment que je ne vois pas d’autre instant aussi propice pour la poser. A vrai dire, celui-ci ne l’est pas vraiment non plus, mais j’en peux plus d’attendre.
Agrippa me regarde d’un œil sceptique mais finit par craquer :

-Eh bien, tu es direct toi. Soit. Comme Lucian te l’a déjà dit, nous nous faisons appeler le cirque du freak.
-Qui êtes-vous réellement ? je précise.
-Laisse moi le temps de finir, gamin ! Bon, nous nous faisons appeler ainsi, mais ça ne veut pas dire pour autant que nous ne sommes que de simples artistes. Pour que tu puisses comprendre, je vais commencer par t’expliquer un certain fonctionnement. Si tu veux, partout à travers le monde apparaissent diverses créatures. Succubes, leprechauns, lycans, et bien d’autres. Certains n’ont aucun effet néfaste sur la société, mais les autres en revanche représentent un risque que nous ne pouvons pas nous permettre d’ignorer. Suite à ces apparitions, un groupe s’est formé pour lutter contre ces « monstres ». Très vite, leur cause a eu énormément de succès et ce groupe a prit une ampleur inimaginable. Cependant, les apparitions se font à travers le monde et la fraternité, s’étant juré de protéger les citoyens, de ces menaces ne put se résoudre à les laisser sans protection. Alors ils créèrent la Fédération de Protection contre l’Etrange, soit, la FPE. Ils formèrent plusieurs sous-groupes formés afin de lutter contre ces créatures et les envoyèrent aux quatre coins du monde. Leur mission à tous était simple, éliminer la menace. Tuer ces créatures, peu importe les sacrifices nécessaires.
Nous sommes des envoyés de la FPE. Enfin, pour la plupart d’entre nous. Certains ignorent notre but et ne sont là que pour le show et les spectacles. D'autres sont simplement de ces créatures considérées commes « nuisibles » et qui pourtant ne représentent aucune menace. J’en fais partie par exemple.
-Et la fédé’ vous laisse vivre comme ça ? J’veux dire, vous avez pas eu droit à un procès ou un truc du genre.

Sur ce, le visage d’Agrippa prend un air lointain.

-C’est la que ça se corse, à vrai dire. La fédé’, comme tu le dis, n’est pas au courant de mon existence, ni de celle de nos « monstres ». Pour eux, nous sommes morts. Ils préfèrent tuer toute forme de vie considérée comme nuisible envers la société sans connaitre chaque individu qui la compose. Mais nous sommes différents. Nous ne pouvons nous résoudre à éliminer un être vivant jugé comme « mauvais » par n’importe qui. Alors nous les traquons et nous les emmenons dans l’espoir de les sauver d’autres traqueurs. Forcément, des gens qui se baladent simplement avec de telles merveilles, ça serait pas crédible comme couverture. Alors, nous avons pris la décision de monter ce cirque du freak. Heureusement, l’esprit … festif de Lucian nous est fort utile.

Je prends quelques minutes pour assimiler toutes ces informations. C’est pas que c’est difficile à entendre, mais comprendre le fonctionnement entier d’une communauté en pleine nuit, c’est pas franchement facile. Une question me perturbe tout de même :

-Dis, Agrippa. Tu as dis que ces créatures apparaissent à travers le monde depuis un moment. Comment ça se fait que personne n’en ait jamais entendu parler auparavant ?
-T’es un petit malin toi hein ? En sois, toutes ces choses ne sont pas visibles par tout le monde. Au départ, seuls pouvaient les voir certaines personnes. Les Auréens. Mais depuis peu, elles apparaissent de plus en plus au yeux de n’importe qui et nous essayons d’éviter un certain massacre. Enfin, c’est plutôt énorme comme quantité d’informations à assimiler. Tu devrais te reposer.

Je n’essaie pas d’insister. L’idée de passer une nuit paisible et en sécurité me remonte fortement le moral. J’ai vraiment hâte de me retrouver dans ce lit aux draps de sang.
Agrippa se relève et me tend la main.

-Au fait, qu’il dit, comme je suppose que tu vas rester ici quelques temps, autant te rendre utile. Demain tu ira avec Calvin et David en forêt. Ils ont repéré un petit groupe de Surgull. C’est pas très dangereux comme créature, tu devrais t’en sortir. Sur ce, bonne nuit Watson Wild !

Un Surgull ? C’est quoi encore ça ? Enfin, c’est pas important. Je verrai bien demain de toute manière. Pour le moment : dodo !



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